Pour un petit point

Les mécanismes d’accoutumance au rugby sont du même acabit que ceux aux séries télévisées. On se plonge dans une saison avec délice et détermination. Au fil des épisodes, on rit, on pleure, on s’émeut, et quand tout ne se passe pas comme on l’aimerait, on peste, on marmonne contre l’arbitre ou contre les scénaristes, même si on sait que quelque part, ils sont aussi des acteurs du show. Du reste, on continue quand même à regarder sans rien manquer.
Et puis un jour, on se pose de l’autre côté de la barrière (ou sur son canapé) et une pensée nous frappe : « merde, il ne reste que quatre épisodes ! ». Alors il ne nous reste que les yeux pour pleurer et à prendre notre mal en patience jusqu’à la prochaine saison. C’est un peu ça qui se passe, maintenant, d’autant que cette fois, il n’y aura pas de championnat de France en guise de spin-off.
Oui, mesdames et messieurs, petits rouges et grands noirs, il ne nous reste plus que quatre matchs à jouer, à moins d’un miracle mathématico-sportif requérant a minima un carton plein des sangliers et une défaillance majeure de Tournus. Comme vous pourrez vous en douter, la tâche s’annonce compliquée. Bon, mais de toute façon, les comptes d’épicier, ça n’a jamais été notre spécialité. Vivre les matchs au jour le jour, voilà notre idéal. Et en ce dimanche, il fallait déjà franchir l’obstacle champagnolais. Duel de jurassiens en perte de vitesse : le spectacle s’annonçait alléchant, d’autant que les quelques intempéries prévus dans l’après-midi ne donnaient aucun signe de vie, et n’en donneront aucun. Après les tempêtes de Montchanin, ce n’était pas fait pour nous déplaire.

Le match de la réserve

Le voyage des réservistes arboisiens aux aciéries s’était soldé par une défaite 28-10, les sangliers avaient donc naturellement à cœur de faire mieux, en particulier devant le public maison. Le début de match fut largement à l’avantage de nos fiers cochons sauvages des vignes : après une espèce de round de chauffe histoire de se mettre en jambe (et histoire de trouver proprement la faille dans la défense) Juju se joua des derniers défenseurs pour aller marquer un essai qui fut transformé. 7-0. Cette première banderille réveilla un peu Champagnole, qui réduisit le score sans trop tarder, mais avec juste une pénalité : 7-3. Les débats s’équilibrèrent ensuite, et il fallut attendre la fin de la première période (pile poil quand j’étais en train de me changer dans les vestiaires, bien entendu…) pour voir Léon aggraver la marque. 12-3 après l’échec de la transformation. Le score en resta là jusqu’à la pause. Les protagonistes purent se ressourcer brièvement, et le match ne tarda pas à reprendre.
Il reprit avec d’autres intentions de part et d’autres : Charles (Jeanneret, puisque Decle a décidé de ne plus rien branler sous prétexte qu’il a marqué un quadruplé à Seurre, feignant de rouquin, va !) ouvrit les hostilités, suivi de près par Antoine, puis Alexis Gross, puis Pierre Revelon. Au passage, je remercie Charles, qui, non content d’avoir marqué un essai, eut le bon goût de se rappeler de tous les marqueurs ainsi que de leur ordre de passage au poste frontière de la terre promise.
De leur côté, les visiteurs marquèrent un essai transformé et une pénalité. Le préposé aux transformations qui succéda à Hugo (sorti à la mi-temps pour aller glaner du temps de jeu en première) n’étant pas en réussite, le score se figea à 32-13 jusqu’aux coups de sifflets finaux.
En résumé, une belle prestation des réservistes : match sérieux et victoire sans appel. Du point de vue du classement, cela ne nous avance guère, car on a pas mal de points de retard, et au vu des matchs qu’il reste à jouer, il semble peu probable d’atteindre le podium. La quatrième place, à la rigueur, mais cela dépendra des résultats de Dole, s’ils perdent leurs matchs et que l’on gagne les nôtres, la quatrième place est envisageable. Au vu de notre début de saison un peu moyen, ce ne serait pas si mal, il faut l’avouer. Quoi qu’il en soit, il faudra aller battre la réserve du Charolais XV chez eux, ce ne sera pas de la tarte, attendu qu’ils sont venu nous battre chez nous, mais de l’eau a coulé sous les ponts, depuis… On demande à voir, et on est tous derrière la réserve, car sans sa réserve un club n’est que l’ombre de lui même, on ne le répétera jamais assez.

Le match de la première

Et nous y voilà. C’est assez marrant, quand on y pense, mais la différence d’enjeu fait que, même si une réserve roule sur toute sa poule alors que sa première est à la peine, on peut s’empêcher de penser, lorsque les 15 heures sonnent au clocher, que ça y est, les choses sérieuses commencent. Bien sûr, les matchs Champagnole-Arbois, ou Arbois-Champagnole ont toujours eu une saveur toute particulière sur laquelle nous ne reviendrons pas, puisque tout a déjà été dit. Voir les résumés précédents, si jamais.
Bref, dans le contexte actuel, comme il était expliqué dans la pompeuse intro de ce verbeux résumé, Arbois et Champagnole ont beaucoup perdu de la dynamique qui les a poussé très tôt à truster le haut de tableau du championnat. Les choses se sont sérieusement compliquées pour tout le monde. Les départs, les blessures, le calendrier facétieux… tout le monde est peu ou prou logé à la même enseigne, mais chez certains, il y a plus d’impact. Champagnole n’a plus gagné depuis Dole, et Arbois depuis la courageuse, mais laborieuse victoire face à Besançon. On ne va pas dire que les temps sont durs, mais il faut quand même serrer les dents… En tout cas, même s’il n’y a plus guère d’enjeu sportif, personne ne se laissera battre impunément : malheur au vaincu comme disait l’autre.
Vivant un peu dans l’insouciance des tensions sportives, le public vivait un bel après-midi. Le soleil brillait, le maquillage rouge et noir était de sortie, les jeunes pousses de l’école s’égaillaient joyeusement ça et là, attendant de faire une belle haie d’honneur pour les seniors. C’était la fête, en somme, et c’était bien agréable à voir, en cette époque parfois un peu tristouillette.
Sur le terrain d’échauffement, il se passait comme un je-ne-sais quoi. Je ne nous ai pas senti aussi concernés qu’on aurait dû l’être. Ce n’était pas forcément un mauvais signe, mais bon, en l’occurrence… Après vingt minutes de jeu. Arbois n’avait pas vu le jour et déjouait complètement. Champagnole n’en demandait pas temps, et menait 0-13 après deux pénalités et un essai transformé. Dans les rangs rouge et noir, la tension se changea un peu trop lentement en révolte, et lorsque enfin cela arriva, le mal était déjà fait, en quelque sorte. Après cette entame catass, les sangliers remirent la main sur le ballon et se mirent à jouer avec plus d’allant. Champa se montra indiscipliné dans sa moitié de terrain, et les rouge et noir insistèrent en touche. Cet acharnement fut enfin récompensé peu avant la demi-heure de jeu. Un maul de bonne facture couronna une pénaltouche d’un essai marqué par Florentin. Pas de transformation, comme souvent en ce moment, mais au moins, les affaires reprennent. 5-13 score à la mi-temps.
Le discours de la pause fut musclé. Du point de vue comptable, le retard n’était pas irrémédiable, mais dans l’état d’esprit, on était loin d’être en avance, et il était évident que Champagnole n’allait rien lâcher.
Les arboisiens revinrent sur le terrain avec d’autres intentions, mais avec encore beaucoup de maladresse. Les visiteurs frappèrent à nouveau en premier, d’une pénalité. Le pragmatisme des vert et rouge porta le score à 5-16, et puis les sangliers se réveillèrent d’un cran. Transformant le jeu avec plus de vitesse dans l’axe, les rouge et noir avancèrent enfin. Un Florentin débordant d’énergie put alors re-franchir la ligne de craie. Les champagnolais payait alors leur infériorité numérique due à un carton blanc, et cette fois la transformation passa : 12-16 match relancé, mais encore loin d’être gagné. Champagnole continuait à subir, en témoigne ce carton jaune reçu aux alentours de l’heure de jeu. Nico Arnaud en recevait un lui aussi quelques minutes plus tard, mais les arboisiens restèrent sur leur dynamique, et marquèrent à nouveau : belle attaque et belle liaison avant/trois-quarts, un bon deux contre un joué par Maxim et Kevin s’en alla aplatir au grand plaisir des spectateurs locaux. Certes, la transformation ne passa pas, mais le score était enfin à l’avantage des rouge et noir.17-16. Allait-on voir, comme souvent cette année, à une fin canon des sangliers avec un surplus d’énergie et de détermination ?
Et bien, non, hélas, pas cette fois.
Les arboisiens retombèrent dans les travers du début de la rencontre, avec des mauvais choix et des imprécisions. Face à une équipe qui dispose d’un buteur en réussite, c’est tout sauf une bonne idée. Une sautée imprudente, une interception champagnolaise, et un ballon qui aurait dû être géré se mua en ballon chaud qui se solda par une pénalité qui remettait Champa aux avant-postes. 17-19 et moins de dix minutes à jouer. Nerveux, les arboisiens tentèrent l’impossible avec des gestes parfois désespérés, sans que cela n’influe sur le score, mais cela donnait la possibilité aux visiteurs de gérer confortablement leur fin de match. Ce fut un crève-cœur de voir nos chances s’envoler définitivement sur une touche un peu confuse. Victoire 17-19 pour Champagnole. Bravo à eux, ils sont allés la chercher.
Nos mines grises se sont tout de même éclairées lorsque le moment fut venu d’aller saluer nos supporters. Vous étiez encore là, oui, et vous nous avez applaudi avec ferveur. C’est peu de le dire, mais ça nous a réchauffé l’âme.
Bon, ceci dit, c’est la dure loi du sport, et il faut savoir mettre la tristesse de côté. À présent nous avons une troisième place à défendre. St-Apollinaire a vendu chèrement sa peau face à Montchanin. Ces derniers n’ont pas accroché le bonus offensif, et restent de fait un petit point derrière nous. Du reste, si on regarde bien, la deuxième place est encore accessible, mathématiquement parlant, puisque Dole a battu Tournus. Bon il faudrait plus que jamais un tour de magie pour les dépasser, mais de toute façon, il nous faut gagner tout ce qui nous reste à jouer pour rester sur la boîte, alors… Taïaut ! On va se resserrer autour de cette déconvenue qui nous aura quand même rapporté un petit point de bonus, et on va revenir en force pour terminer cette saison en trombe.
De la force, il nous en faudra, et du caractère aussi, car ce ne sera pas du nanan d’aller battre Charolais XV à Paray-le-Monial.
En ce qui concerne l’Ethole, il nous faudra la défendre une dernière fois avec la réception de Verdun. En espérant vous offrir un plus riant spectacle pour cette ultime partie à domicile de la saison. On se reverra à cette occasion, on vous donne rendez-vous, et que le fête soit belle, et en rouge et noir.

Les scores : victoire en réserve 32-13. Défaite en première 17-19

La contrepèterie de la semaine :

Il hait Jacquot dans ce pull.

(J’essayerai d’en inventer une par semaine, mais c’est pas facile, c’t’affaire-là)